1. |
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Ce qui précède est tout
Le silence éloquent
Prenez en de la graine batraciens sans cuisses !
Le verbe n’est rien que la pénible tentative d’handicapés mentaux de capturer l’infini du silence
La parole est une insulte au vrai
Qui pour l’humain n’existe pas
En vertu du fait qu’un arbre
Comme une conviction
Ne peut tomber qu’avec fracas sinon…
Pas d’arbre
Pas de chute
Pas de sol
Sinon la pensée sans appui se nie
Et le penseur sénile se masturbe bruyamment les synapses
Et l’être collapse
Ce qui suit n’est rien.
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2. |
Crocs
04:39
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Une femme s'avance, toute vêtue de blanc
Ses crocs couinent sur le sol plastiqué
Son linge est taché de orange
Il flotte hideusement. C'est une informité.
Elle arrête ses pas.
Une immense poignée pendouille à une porte
Elle tend l'oreille, rassemble son courage,
La porte s'ouvre sur une pénombre.
Est-ce un ronflement qu'elle entend ?
Est-ce la clim ou un rugissement ?
Ce n'était pas un ronflement.
Un œil inquiet scrute ses mouvements.
Une main faible actionne la télécommande et le corps se redresse.
Le visage sourit péniblement.
Elle rend ses gestes prestes et son babil ardent.
Leçon n°1 : combattre l'osmose par l'osmose.
La bataille commence
Dans l'ordre qui dans ces lieux règne
Malgré l'agitation
Malgré l'urgence et les impondérables
Les contre-indications
Les troufions qui renâclent
Quelques kapos minables
La plèbe doléante et l'administration
Et puis l'insuffisance des soirs de permission
Les batailles perdues d'avance
Qu'il faut mener dans le silence
La souffrance toujours
La mort bien trop souvent
La folie par moment
Ces portes qui se claquent
Il y a ceux qui s'effondrent et ceux qui ont la rage
Il y a les vulgaires, il y a les sublimes
Il y a ceux dont l'image vient hanter nos déprimes
Toute l'humanité sans plus d'intimité
Et ces soldats debout devant le lit carré
Qui parlent météo pour fuir les litanies
En nettoyant leurs armes.
Leçon n°2 : répéter ce qu'on fait, répéter ce qu'on dit.
La mort donne au malade tous les droits.
La science donne au médecin tous les droits.
Votre polyvalence donne aux aides beaucoup de droits.
Le reste est donné par irresponsabilité.
Alors je vous le dis mes amis,
Infirmiers, infirmières,
Si chacun prend ses droits vous avez celui de partir.
Soldats ! Vous avez droit à la retraite.
Leçon n°3 : laisser le sacrifice aux religieuses.
La clim' était coupée
Le malade éveillé
C'est ses tripes qui rugissaient
Comme un félin blessé
Ce n'est pas que les gestes entre eux deux échangés procurent du plaisir
Mais il est agréable de se savoir soigné
Même à travers la gaze le contact est humain
Même si il a mal il se sent caressé
Ces deux êtres renouent avec l'humanité
Cet amour n'est que fraternel
Pourtant l'homme allongé sait que seule une femme peut le lui procurer
Quelle belle perversité
Leçon n°4 : chasser l'humanité n'est que vue de l'esprit.
Après une ultime attention,
Elle retourne à sa tournée.
Le lion ne rugit plus,
Il ronronne à présent.
En refermant la porte elle pousse un soupir :
Pourquoi va-t-il mourir ?
Pourquoi a-t-il quatre-vingts ans ?
Mais déjà la sonnette écourte ce moment :
Pourquoi dois-tu courir ?
Pourquoi brûles-tu tes vingt ans ?
Leçon dernière : tout est relatif ; être vivant aussi.
(Dans le but de ne privilégier aucun type de référentiels en particulier dans l'écriture des lois de la nature, la relativité générale traite en plus les référentiels non inertiels, c'est-à-dire dans lesquels un corps libre de toute contrainte ne suit pas un mouvement rectiligne et uniforme. Dès lors, tout système de coordonnées est a priori admissible et, généralement, ses limites se révèlent à l'usage.)
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3. |
Sans Titre
05:30
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M. Le Préfet je
N'écrirai plus de lettre
L'écrit est silencieux
Je porterai le mien jusque sous tes fenêtres
On dirait pas comme ça mais nous nous ressemblons
M. le Préfet
Tu as perdu ton nom au profit de ton titre
Moi je m'anonymise à tous les titres
Au titre de ta loi qui ne reconnaît pas
Moi
Mon histoire
Même mon cas
Putain
Je suis pas même un cas
Au titre des journaux qui ne me nomment pas
Un sans pap' ci un sans pap' là
Au titre de l'état qui me comptabilise
Je suis moins d'un ‰
Au titre du passant qui m'appelle monsieur
Non
Pas monsieur
J'ai pas l'âge qu'on m'appelle monsieur
Monsieur
Monsieur
Non mais sans dec'
M. Le Préfet je
N'écrirai plus de lettre
L'écrit est silencieux
Je porterai le mien jusque sous tes fenêtres
On dirait pas comme ça mais j'ai des trucs prévus
M. le Préfet
J'suis sûr que toi aussi
Que t'as plein de dossiers et de gens à boucler
Que l'on t'attend chez toi
Tu voudrais pas rentrer trop tard
Moi c'est un peu l'inverse
Je voudrais pas rentrer trop tôt
Au pays personne ne m'attend
Si ce n'est Mesdames la rue et la route
Je te trouve bien territorial
De me chasser ainsi
De me renvoyer en exil sans sourciller sans insomnie sans te soucier de mes périls
Je suis pas tout seul ici
Je suis pas tout seul
Ne nie pas ça
M. Le Préfet je
N'écrirai plus de lettre
L'écrit est silencieux
Je porterai le mien jusque sous tes fenêtres
On dirait pas comme ça mais on s'la gèle dehors
M. le préfet
Tu pourrais payer ton café
Comme ça on discuterait
Tu dirais à ta haie de CRS de se tailler
Et on s'assiérait
Promis je suis civilisé
Parfois j'comprends pas bien ce que je suis pour toi
Puis je me dis qu'tu t'en branles
Que je suis rien pour toi
A force j'ai intégré
J'ai intégré tes règles
J'ai intégré tes lois qui s'abattent sur les doigts des écoliers de fond de classe
Et ma classe elle est tout au fond
Je dis ça c'est pas contre toi
Peux-tu en dire autant ?
Au temps pour moi
J'crois que je dérange
Depuis le temps...
"[...] depuis que la société a découvert la discrimination, redoutable arme sociale qui permet de tuer sans effusion de sang ; depuis que les passeports et les certificats de naissance, et parfois même les déclarations d'impôts, ne sont plus des papiers administratifs mais matière à distinctions sociales. Il est vrai que la plupart d'entre nous se trouvent inféodés aux normes sociales ; nous perdons confiance en nous si la société nous rejette ; nous sommes - et ce depuis toujours - prêts à payer n'importe quel prix pour être acceptés." H. Arendt
M. Le Préfet je
N'écrirai plus de lettre
L'écrit est silencieux
Je porterai le mien jusque sous tes fenêtres
On dirait pas comme ça mais va falloir que j'y aille
M. le préfet
J'te dis à la revoyure
Même si je t'ai pas vu
Eh
Juste un dernier truc
Si ça t'embête pas
Tu voudrais pas m'oublier un peu
Ca pourrait être un bon sentiment réciproque entre nous
L'oubli
Tu vois tu me régularises
Et j'arrête de venir chanter sous ton balcon
Montêtus d'un côté et Crapulets de l'autre
On s'ignorera de nouveau
T'inquiète je ferai pas de vagues
Tu sais
J'ai peur des vagues
De m'noyer dans les procédures
Peur de me faire jarter
Que tu m'empêches encore de vivre
M. le préfet je
N'écrirai plus de lettre
Je ne plie plus mes mots
M. le préfet je
N'écrirai plus de lettre
Je me poste sous tes fenêtres
M. le préfet je
N'écrirai plus de lettre
Ouvrez les petits pois !
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4. |
L'Atoll
03:44
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Au sol il y a le vent brassé par les poids lourds
Qui roulent en bourrasques
La dépression des freins/les pistons qui s’emballent
Le long des avenues clôturées de grillages gonflées par le courant
Il y a le soleil qui luit sur le goudron de rues interminables
Le fracas métallique
Des machines
Des tôles
Et de divers engins
De drôles d’éléphants
Qui charrient des palettes
Des grues qui pêchent au crochet
Aux pinces ou à l’aimant
Il y a des cheminées et des tours de contrôle
Au dessus des hangars
Où sont autocollées
Des lettres
Multicolores
On dirait un désert
Mais du ciel on distingue
Les îlots luxuriants
De containers enchevêtrés
Autour desquels des casques
Comme de petits jouets
Gravitent sans répit
Du ciel se modélise
Une cartographie
Des flux de marchandise
Ce n’est plus un désert
C’est plutôt un atoll
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5. |
3 Singes (en hiver)
07:28
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I
La violence d’un cri claque à travers la nuit
Tu hausses les sourcils pour mieux dresser l’oreille
Ce ne fut qu’un éclair constitué de db
Tu guettes le tonnerre
Tu guettes le roulis implacable des meutes
Lorsqu’elle se déchiennent
Tu te mets en alerte
Tu as la lassitude et la tristesse sage
L’expérience érodée
D’un vieux matou qui a eu son lot d’escapades
Tu restes hors de portée
Des clameurs te parviennent des rues concomitantes
Sans que tu sois fixé
Sont-elles de nature inquiétante ?
Il y a sur ton visage un air désabusé
Ton souffle est une antienne
Il y a la fatigue de ta jeunesse usée
Dans l’éternel retour
De ces nuits embrouillées que tu vois défiler
Dans les rues maculées d’alcool
Où chaque soir des troupes de connards refoulés
Par opportunité brisent couilles, canettes, nez…
Et tu sais d’expérience que les balayeurs
Retrouvent au matin, parmi les bris de verre,
Des petits bouts de gens, anonymes, discrets,
Qu’on a dépossédé.
II
Tout est affaire de viscères
On a beau se serrer la vis
L'instinct vient nous remettre au pas
Les appétits vont à tout va
Va ma cervelle vont mes tripes
Accroche-toi mon estomac
Balance si tu veux mon cœur
Que je m'organise à loisir
L'oisiveté ne vous sied pas
Je vous sais gré des turbulences
Auxquelles vous inclinez tant
Je vous appelle mes émois
Tout est affaire de viscères
On a beau se serrer la vis
L'instinct vient nous remettre au pas
Les appétits vont à tout va
J'épluche au plaisir vos humeurs
Les deux biles le sang la lymphe
Ma gerbe et ma sueur d'élection
Comme on décortique une idée
Une idée qui est tique au corps
Morsure infection parasite
Qu'on titille et qui nous titille
Comme on masturbe ses boutons
Je sais qu'un jour privé d'intrigue
A décompte des cicatrices
Enfin dépossédé d'idée
Je me jetterai à la fosse
Sceptique face à mon bilan
J'aurai vécu comme un vorace
Avec l'angoisse de ma faim
Et un trou noir pour seul ulcère
III
Je n’écoute jamais la voix de l’expérience
Qui ouvre ses plaies sous mon nez
Qui branle sa mémoire et en fait une science
Je sais, le déchet que l’on est
Je n’écoute pas plus la voix de l’apaisé
Qui a eu la révélation
Que la vie rassasie tant qu’il veut l’exposer
Je sais, le laurier des stations
Je fais la sourde oreille aux pharmaciens de l’âme
Qui remédient à coup d’axiome
Qui pardonnent la faute et condamnent le blâme
Je sais, on subit son génome
J’envoie balader ceux qui me mettent en garde
A la vue de tous mes excès
J’ai le bol bien rempli sans qu’en plus je le farde
Je sais, je suis un désaxé
Laissez moi s’il vous plaît mon instabilité
Faite de doutes et de craintes
Pouvoir me réfugier dans l’intranquillité
Je n’ai pas d’issue je redoute
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LIRYCORD Villeurbanne, France
LIRYCORD is here to make
shine artists singers and rappers.
He started his activity in 2020 as a
Composer, recording studio and manager for artist / singers / rappers.
Since the summer of 2021 he has been based around Lyon and wishes distinguish this city by its musical cultural richness.
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